Chroniques

[J’ai testé pour vous] Tomber amoureuse

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A force d’être agressée physiquement par des posters géants Meetic, d’être l’objet de dîners avec « invité surprise » (il suffit de visualiser l’enfant qu’auraient pu avoir Edward aux mains d’argent et le chanteur de Slipknot pour identifier le prétendant qu’on m’a réservé…non, imaginez juste le chanteur de Slipknot, en fait) de me sentir paria à ma propre fête d’anniversaires où même la salière et le poivrier sont assortis, de constater que mon chat était dans une relation stable en trouple avec la siamoise borgne du 6ème et le chartreux mythomane du 1er,  j’ai décidé, moi aussi, de tenter ma chance au grand bingo du love.

D’office, j’ai éliminé l’étape Tinder. Bien que l’intérêt général pour l’appli commence à sentir le rance, cela aurait pu démontrer ma pro-activité dans la course à la plénitude amoureuse. Problème : la dernière fois que je m’y suis inscrite, j’ai été super-likée, notamment, par :

  • Un mec de dos ;
  • Un mec enlaçant une bûche (du pin ou du chêne) ;
  • Un mec en couche Pampers ;
  • Une mante-religieuse ;
  • Un viking ;
  • Un escalier.

N’ayant ni le temps ni l’envie de remettre en question ma sexualité aux côtés de photos clairement non-contractuelles, j’ai opéré ma révolution personnelle : et si je relançais ceux que Facebook – Internet – Marmiton.fr – la lessive – le boulot – les potes – la piscine – le shopping – Instagram – ma lecture en retard – les expos – les vidéos de chow-chow en string –  m’avaient fait manquer ?

Oui, ces garçons croisés le temps d’une soirée, d’un concert, d’une nuit, auxquels j’avais à peine répondu ou complètement gommés de mes tablettes, faute d’avoir ressenti ce que Before Sunset nous a toujours vendu : la brique en pleine face, l’éclair dans le cœur, la flèche dans le dos, j’ai nommé, le coup de foudre, dont les symptômes ressemblent à s’y méprendre à une bonne vieille torture médiévale…et aussi parce qu’ayant refusé, pour la plupart, de partager leur assiette de frites avec moi. Nan mais oh.

Mon portrait-robot du couple : on découvre soudain que ça sent parfois mauvais, gigote, vous réveille en pleine nuit en réclamant un câlin. Ah non, pardon, ça, c’est mon neveu de trois mois. Ou mon ex ? J’ai tendance à les confondre…

L’amour fait mal, mobilise des neurones inconnus, monopolise la conversation, abreuve la littérature depuis des siècles, rend alcoolique, méfiant, jaloux, possessif, nerveux, hypersensible, fragile, hystérique…

Alors il semble qu’une crainte, même infime, au fil des années et des expériences est permise. Que malgré l’art et la manière, le sourire et l’humour, nous ayons besoin de ce bonus incontournable : du temps. Pour se rencontrer, s’apprendre et se reconnaître.

Dans ce contexte, je n’ose vous décrire combien j’ai été surprise par la simplicité de ma rencontre avec Lui. D’ailleurs, je ne m’en remets toujours pas. Comme si toutes ces années de circonvolutions mentales ne m’avaient menée qu’à cet instant précis. Que chacune des expériences les plus navrantes que j’avais pu vivre trouvaient leur issue tout contre Cette Personne-là.

Du coup, face à autant de perfection, de lumière et d’évidence, j’ai fait ce que toute personne frappée par la Grâce aurait fait.

J’ai fui.

Nous étions là, à discuter, en terrasse. Et je l’ai imaginé, à mes côtés dans ses bons comme dans mes mauvais moments. J’ai observé les crises, la rage, les réconciliations, les erreurs, les tentatives ratées, les espoirs.

Je nous ai vus partager ces micro-instants de pure contemplation, alors que la foule deviendrait brume autour de nous, et que nous adopterions, dans une gestuelle qui n’appartiendrait qu’à nous, les mêmes postures tendres.

J’ai visualisé ma vie pleine de toute cette félicité, flip book des beaux jours en devenir.

Alors, le temps qu’Il se baisse pour ramasser son briquet, j’ai prétexté une crise de conjonctivite soudaine et j’ai couru.

Tout ce chocolat consommé suite à une énième déception sentimentale, ces tests de compatibilité débiles pianotés dans le secret de l’illusoire mode Privé de mon Iphone, ces couples lovés l’un contre l’autre tant haïs dans la rame de métro, ces tirades grotesques et avinées hurlées à la face de la Lune « Amour, allez, viens, même pas peur ! », j’ai tout bazardé dans ma course.

Enfin chez moi, bain chaud, Quand Harry rencontre Sally calée sous la couette. Heaven can wait…au moins une nuit.

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