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« Let’s talk about sex»
Et, à ce titre, rien ne vaut une immersion en terrain inconnu. Du courage. Je m’interroge sur la situation des livres interdits. Entre la section « Développement personnel » et « Naissance », je localise un micro rayon, une colonnade de cent quatre vingts centimètres sur quarante. Une fantaisie face au colossal rayon Régime-minceur et, lui faisant face telle une réponse/une cure, le secteur « Cuisine ». L’ultime pugilat entre bonne chère et mauvaises graisses, un délice de paradoxe. La place semble désertée, juste quelques futures mamans et des chefs de rayon affairés. Pourtant, j’hésite: ne devrait-on pas attendre la bonne rencontre avant de se lancer dans de telles lectures ? Et si cela me renvoyait à…
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« Devenir adulte? Vraiment?»
Ce n’est pas une urgence, pas le dernier short en dentelle du printemps et, pourtant, cela nous est seriné depuis notre naissance, grâce à un marketing implacable: quand tu seras grand, toi aussi, tu seras, toi aussi, tu sauras. Alors, qu’est ce qu’on attend ? Enfant, on aspire à décrypter les conversations d’alcôve des parents tout comme celles des escargots, la main en cornet autour de l’oreille: comment font-ils pour se comprendre, en parlant aussi bas? Le temps passe : nos préoccupations adolescentes prennent le dessus et il n’est rien de plus fondamental que d’écouter du son le plus fort possible, porter des Van’s © et embrasser Léo, redoublant de Terminale S…
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La “folk afro-belge” est un art à vivre.
Aller à la rencontre de la voix et de la guitare de Paul van Eersel, c’est réapprendre à découvrir la musique: surtout, se fier aux vibrations de son cœur, surtout, éviter les liens de filiation et autres raccourcis artistiques trop aisés. De la folk oui, en un français libérateur et une rythmique inattendue. Dès lors, en se pressant à une de ses scènes, on s’étonne à peine d’éprouver le sentiment de retrouver une bande de copains que les aléas du quotidien auraient écartée de notre quotidien. Le sourire s’installe sur les lèvres pour ne plus les quitter, longtemps encore après la dernière corde pincée. Un paysage musical où l’on va…
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“Souffrir pour être belle, je n’ai pas envie, c’est grave ?”
Souffrir ne signifie bien entendu pas faire souffrir autrui, notamment en portant des bottes cavaliers sur un baggy usé. Bref. Et d’abord, de quelle souffrance parle t-on ici? La cire brûlante, la pince qui arrache le poil ET la peau, le recourbeur qui ourle la pupille définitivement, le vernis dont les effluves feraient tourner de l’oeil une foule privée de l’odorat, les talons qui nous permettent de découvrir des moyens insoupçonnés de perdre l’usage de nos pieds? Cet adage démentiel de vide aurait-il pour couronnement ultime la remarque d’un improbable quidam qui aurait, ô miracle ! noté le brio de notre nouvelle toilette, nouvelle coiffure? Ladite souffrance inclurait alors les compliments…
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“Pourquoi le bon mec ne se trouve jamais dans le bon wagon?”
…sachant que le seul wagon qui existe reste le nôtre, retraçons ensemble le postulat de départ. Il y a de ces jours où l’on se sent particulièrement prête à séduire et à être séduite. Tout a été mis en œuvre: les ongles sont sertis de la bonne teinte, notre crinière, aussi souple que dans une réclame, glisse voluptueusement sur notre front. Notre émail dentaire devient un phare dans la brume matinale, les piétons dansent au son de “Let’s dance” sur notre passage, les voitures nous laissent traverser au feu vert et klaxonnent comme pour un mariage. Oui, il y a de ces jours où notre potentiel à choper ne fait…
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« Fréquences » : d’écorce et de cuir
On pénètre dans l’exposition de Jane Puylagarde comme on entre en religion : tout ou rien. Oeuvres magnétiques, le motif se fait sobre, rugueux. Les analyses érudites et compassées peinent à s’y retrouver. Place à la contemplation. Du bout de ses épingles à cheveux, l’artiste attaque son support, lui conférant cet aspect granuleux, sorte de peau de bête se prêtant au jeu de l’art contemporain. Multicolores, monochromes ou dégradées, les toiles laissent apparaître des visages issus de notre imaginaire le plus enfoui. La salle des électrocardiogrammes sur mesure se charge de placer le visiteur face à une radicalité vibrante, féministe, qui s’applique à l’extirper de sa torpeur de citadin angoissé. Une…