Arts
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John Ashbery, poésie en réalité augmentée
Et si la texture du réel n'était pas vraiment celle que l'on imaginait ? Dans les années 70, John Ashbery, avec son recueil "Autoportrait dans un miroir convexe", donnait à penser, et à percevoir autrement.
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“Mes beaux habits au clou”: les mélodies en clair-obscur de Langston Hughes
Le recueil de poèmes Mes beaux habits au clou de l’auteur américain Langston Hughes, édité en début d’année chez Joca Seria, donne à découvrir un style acéré et subtil, comme un refrain que l’on fredonnerait depuis son enfance en ayant oublié d’où il nous vient. Au départ, ce que j’ai aimé, c’est le titre. Mes beaux habits…une tenue de soirée, le costume pour l’office dominical, la robe que l’on ne revêtira que pour cet instant précis. Je me suis enveloppée dans la cadence de ces cinq mots en attendant de recevoir l’ouvrage. Mes beaux habits au clou… La chute est aiguë. Le clou, c’est le synonyme d’un quotidien qu’on connaît…
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A Ivry, la pièce « La Ronde » se joue des cœurs et des corps avec brio
Le duende, c’est cet esprit ancestral, ce fluide quasi-surnaturel qui habite les musiciens et danseurs de flamenco. On ne le traduit pas, il ne s’explique pas. Et dans cette belle salle du théâtre El Duende, à Ivry, suffisamment accueillante pour créer de l’intime, il s’infiltre partout, acte de douce résistance. C’est donc sans étonnement que la pièce La Ronde, présentée par la Compagnie du Fil Noir, porte en elle toute cette sincérité, tout cet enfièvrement qui fait d’une pièce une grande pièce. Une structure moderne autour d’une forme idéale La Ronde se compose de dix histoires courtes à deux protagonistes, ayant pour point d’orgue une relation charnelle. Un fil conducteur :…
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[Le film] “La tortue rouge”, de Michael Dudok de Wit
Le pitch : un naufragé prisonnier d’une île au confort sommaire. NULLE ÂME QUI VIVE. eT POURTANT… L’homme ne parle pas, ou, du moins, éructe des exclamations universelles communes à tous ceux piégés dans une situation similaire. Rapidement, la chappe du silence, au départ terrifiante, puis, ponctuée du ressac des vagues et du chant des oiseaux, se revêt d’une singulière familiarité. Alors qu’il essaye, une énième fois, de fuir, une tortue rouge renverse sa frêle embarcation : c’est le début de l’aventure pour le naufragé, avec, en filigrane de sa captivité, l’essence même de notre condition. En retirant tout le vacarme du monde, les luttes infinies d’ego et l’amertume de ne pas…
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[De retour du musée] MALI TWIST, Fondation Cartier, Paris 14ème
Le continent noir est à l’honneur à Paris cette saison avec une rétrospective consacrée au photographe malien Malick Sidibé (1935-2016), vingt-deux ans après l’exposition qu’avait présentée la Fondation en 1995, inédite à l’époque. Né en art comme on entre en religion, celui que l’on surnomme l’œil de Bamako a su poser, sa vie durant, un regard aussi tendre que fervent sur ses contemporains. Sillonnant les bals poussières et les surprises-parties, armé de son appareil Brownie Flash, il se fait connaître en immortalisant les dieux et déesses des nuits chaudes bamakoises, entre frénésie yéyé et nouvelles indépendances. « Le noir et blanc, c’est la vie » Né en 1935 à Soloba, village du…
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[Une déclaration à] Nicolas Fargues : à l’épreuve de la mélancolie
Paris XIVe, l’après-midi, l’été, une terrasse de café coincée entre le boulevard et la bouche de métro. Mon amie Lisa et moi devisons : faner nos plus belles années à user nos mom jeans à l’ombre d’un amphithéâtre frappé d’un éclairage au néon que les morgues les plus modernes envieraient, plus qu’assez. Le nez plongé dans la crème de mon café, je croise le regard d’un passant, quarantaine sportive. Coup d’œil furtif, je me décompose, ma mémoire photographique fait son œuvre. A ma mine livide, ma comparse s’inquiète. A peine ai-je la force de balbutier : NI.CO.LAS.FAR.GUES.OH.PU.TAIN. « Qui c’est ? Tu le connais ? – J’aurais aimé… – Vas-y, fonce alors, va le saluer !…