A boire!
On s’est juré de ne plus boire que de l’eau bien limpide en soirée. Et non, la vodka ne peut pas être une candidate à cette abstinence. Un panaché, à la rigueur, mais cela fait tellement alcoolique repenti ou adolescent en goguette qu’on préfère le siroter sans plaisir lors des apéros en famille, à la table des enfants.
On s’est donc mis au Cola. C’est bien, le Cola, tout le monde aime son petit goût de caramel et ses extraits de végétaux…végétaux. Et puis le sucre réconforte les coeurs solitaires, c’est bien connu. Bon, le diabète est un présent fréquent dudit breuvage mais qui aime bien insuline bien, non? Euh, non.
Dès lors, les options se réduisent. On ne boit pas de thé en soirée, encore moins du lait de soja glacé. Déjà pour la théière qui ne rentre pas dans le sac à main. Ensuite pour la non-saveur de la sève d’une plante grimpante. Et, surtout, pour l’absence d’effet désinhibant. Que serait donc une soirée sans baisers volés auprès d’un repoussant personnage, d’une nymphe s’avérant moustachue? Faudrait-il renoncer au grand délice du rire tonitruant en plein silence, de la main lourdement posée sur une épaule non-consentante? Et la confession publique de ses sentiments enfouis, l’effacement de la crainte ancestrale du ridicule, on oublie?
Ce n’est pourtant pas mentir que d’admettre qu’une tentative d’approche amoureuse ne peut se dérouler convenablement que dans un état second: euphorie (al)chimique, exceptionnelle bonne humeur du fait d’une promotion à la tête du groupe Pernod Ricard©…
…alors, à défaut, on fait avec ce que l’on a…et on boit.
Bien sûr que l’alcool amenuise tout, de la durée du coït à la simple longévité mais il fait comme partie du tableau de famille: c’est le cousin éloigné, radin et opportuniste, qui ne rate jamais une occasion de se glisser à notre table, tout contre notre mère-solitude ou notre nièce-ego en berne. “Bois-moi” nous fredonne la pinte de notre collègue. “N’es-tu pas désolant avec ton jus de pommes?” raille le cocktail siglé “happy hour” de la petite amie. “Tu es enceinte ou chez les stup’ ?” siffle le rencard Meetic soupçonneux. Quant à l’adage “quelqu’un qui ne boit ni ne fume n’est pas digne de confiance”, il achève absolument de mitrailler les derniers remparts branlants de notre libre-arbitre.
La maîtrise de soi, la détente et l’aisance sociale souhaitée plutôt que provoquée, concept totalement dépassé? Ah zut, une goutte de vin sur mon clavier…
Haut les coeurs!
Crédit photo @ geek tonic.com