Chroniques

MODE HOMMES : une dernière chemise rose, pour la route?

pantone rose

La chemise rose porte en elle un impact particulier auprès de ceux qui y sont confrontés. Replaçons-nous, pour ce faire, dans un contexte fantasmé.

Vous avez été convié(e) à l’une de ces crémaillères où les verrines pois gourmands-saumon succèdent à des ballons de vin rouge un peu acide. Le volume sonore s’élève d’heure en heure, à mesure que les convives sombrent dans une ivresse tout en retenue et citations de Tristan Tzara entre deux bouchées de tzatziki. A bout de souffle, les tympans étourdis par ”Last night the DJ saved my life” et autre ”Danse des canards”, vous vous dirigez vers le balcon.

C’est là que vous l’apercevez. Sa barbe semble bien plus douce que le plus soyeux de vos pulls cachemire. Ses souliers ne sont ni pointus, ni vernis, ni pointus-carrés, ni des Converses crevées. Le pantalon est un jean brut, rien de bien criminel. C’est là qu’elle vous bondit aux yeux. Une chemise rose, vraiment ?

Le rituel n’est pas récent. Depuis quelques années déjà, nous avions été habitués à croiser les porteurs des fameux maillots Eden Park en ville, ces rugbymen de canapé, si fiers d’arborer les couleurs rose layette de la marque au petit nœud. On avait eu de l’indulgence pour eux, on les avait assimilé au XV de France, on en était presque tombé amoureux, on avait presque filé de chez eux au petit matin, un peu angoissé par tous ces polos soigneusement classés dans leurs armoires par modèle et par camaïeux…

On les avait oubliées, jusqu’au jour où elles sont apparues, les autres, leurs cousines aisées, les chemises roses. Il y en a désormais de toute sorte et toutes semblent coupables : les fines rayures, les poids, les barres transversales, les croisillons, les tye & dye, les ton sur ton, les discrètes, les fushias, les libertys, les saumons et les à carreaux, les marinières, les manches courtes…

La gente masculine s’est engouffrée dans la tendance sans jamais en revenir. Dans la plupart des garde-robes de ces messieurs est tapie une chemise rose, assumée ou inavouée. 

Sur nombre de forums féminins, il apparaît que la thématique est loin d’être aussi triviale qu’elle ne semble l’être : « atteinte à la virilité », « too much », « impossible à porter », les propos sont confus, hésitants entre assimilation de la touche de ”pink” à une orientation sexuelle ou célébrant sincèrement l’arrivée de la couleur dans le vestiaire mâle. Les magazines masculins ne sont pas en reste, prônant la teinte rose pâle et le non-conformisme altier.

Du côté des femmes, la situation reste délicate. C’est qu’elles en ont tellement croisé, des hommes bien-sous-tous-rapports-mais-têtes-de-noeud-désolé-avec-ma-copine-euh-ma-femme-euh-ma-compagne-c’est-compliqué-mais-si-c’est-juste-pour-coucher-alors-ça-va que le moindre indice, elles le saisissent au vol avec un intérêt tout particulier : cigarette ou cigare, cheveux courts ou catogan, hautbois ou violoncelle, tout élément externe est considéré comme une chance de faire le bon choix, même/surtout pour une nuit. La chemise rose fait partie du critère.

Alors, comment se situer face à l’objet ?Aux Gens Pressés, on avait pour habitude de le classer aux côtés des fans de David Guetto.

Et puis, il y eut Marc J:

1331208524marc-jacobs

Et Drake:

rose

Voilà, c’est un fait, le problème, ce n’est pas vraiment la chemise, c’est plutôt celui qui la porte. “Un jour, mon prince, viendra…”

Haut les coeurs!

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